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2016-12-16T11:43:02+01:00

Balayage

Publié par montanié julie

En Chine, on balaie sans cesse. Dans la rue. Je me souviens de ma stupeur face à cette activité, dans la Roumanie du début des années -70, l'hiver, par des matinées glacées, blêmes qui me voyaient cheminer vers la Biblioteca Academiei où je passerais la journée à lire et prendre des notes. Personne dans les rues, sinon à la rigueur, un véhicule de transports en commun. Mais je croisais le regard de femmes emmitouflées de longues jupes et vestes, la tête entourée de foulards, d'écharpes qui avaient l'air de bandages. Elles balayaient le trottoir vide, d'ailleurs propre, d'un geste comme oriental - toutes avaient un air tsigane -qui durerait jusqu'au soir. Le plus choquant, c'était le balayage de journée, aux heures d'affluence, quand les hommes en imperméable marine type K-Way ou nylon léger à la mode ces années-là - comment n'attrapaient-ils pas de pneumonie? la moindre veste paysanne de peau de mouton les aurait protégés davantage, ils étaient en pardessus de nylon mais portaient tous des toques d'astrakhan - , balançaient leurs mégots à proximité du balai. Ou de la pique? Il me semble qu'il y avait aussi des sortes de piques permettant d'épingler les ordures de trottoir, dans ces années-là. Les balayeuses ou balayeurs éliminaient les déchets, sans un regard de reproche. Quand j'ai lu, bien après la chute du communisme, que ce type de régime ne connait pas le chômage, j'ai automatiquement pensé aux balayeuses de trottoir.

En Chine, donc, au mois de juin 2016, durant ce bref séjour touristique, on balayait dans la rue avec de gros plumeaux à longs fils. Dans les rues mais aussi les toilettes d'hotels, où le long plumeau se promenait sur un carrelage mouillé aussitôt sec, en raison de la chaleur. A peine une semelle s'imprimait-elle sur le carrelage encore humide que, déjà, elle se voyait effacée.

Dans un jardin public de Shanghaï peut-être, des gens usaient en public d'un balai mouillé pour dessiner des formes ou des caractères. C'était plutôt un jeu. A peine le caractère, le dessin ou le mot est-il tracé que sa littéralité s'évapore. Comment ne pas penser que l'activité a dû jadis donner lieu à une épatante forme de samizdat?

A Suzhou, devant le salon d'une maison de thé, ancienne demeure "de riche" d'où s'échappait une belle musique accompagnée de paroles soigneusement pesées et poétiques, sans nul doute une forme de ballade, voire de "longue chanson de table" selon la dénomination des Roumains (et des Mongols), le sol était fait de dessins de cailloux.    

 

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